mardi 18 janvier 2011

Réflexion sur l'Afrique

Mardi 3 novembre 2009

L’Afrique possède d’énormes ressources d’énergie solaire. Elle a un potentiel d’énergies renouvelables, solaires, hydroélectriques, éoliennes, du pétrole, du gaz, des métaux divers, de l’uranium, du bois, du poisson etc. Nonobstant, les indicateurs sociaux n’ont pas évolué positivement : les vingt derniers rangs (sur 177 pays) dans le classement de l’indice de développement humain établi par le Programme des Nations Unies pour le développement (PNUD) sont occupés par des pays d’Afrique subsaharienne.

Notre présent article n’a pas pour objectif de focaliser l’attention de nos lecteurs sur les indicateurs macroéconomiques de l’Afrique, il s’agit de dire ici avec humilité et franchise que notre continent est marginalisé dans tout en dépit de ses fabuleuses ressources.

L’Afrique est un continent marginalisé

Malgré de grandes disparités entre les pays du continent, l’Afrique semble accrochée au wagon de queue du reste du monde. La part de l’Afrique subsaharienne dans le commerce mondial demeure marginale.
La question de la marginalisation croissante de l'Afrique dans le commerce mondial est avérée. La part du continent dans les exportations mondiales a fortement décliné, passant de 5,5 % en 1975 à environ 2,5 % en 2002. Cette marginalisation est souvent examinée en s'intéressant à l'accès insuffisant aux marchés extérieurs dont seraient victimes les pays africains, ou à la taille économique relative de ces pays, en retard de croissance sur les pays dits émergents.

Ce qui est certain, c’est que, déclassée géographiquement sur l’échiquier international, notre continent regroupant 14% de la population mondiale, représente 1,8% du produit intérieur brut (PIB) mondial, 2% du commerce mondial et 5% des investissements directs étrangers (IDE). Pire encore, ce que l’Afrique néglige c’est sa marginalisation monétaire et financière.

Le monde est aujourd’hui gouverné par vingt pays, qu’on a vite nommé G20. Pour mémoire,
ce groupe des 20 (ou G20) est un forum économique qui a été créé en 1999, après la succession de crises financières dans les années 1990. Il vise à favoriser la concertation internationale, en intégrant le principe d'un dialogue élargi tenant compte du poids économique croissant pris par un certain nombre de pays.

Le G20 représente les deux tiers du commerce et de la population mondiale et plus de 85 % du produit mondial brut (somme des PIB de tous les pays du monde).

Selon la classification de la banque mondiale(2008), le rang de quelques pays du G20 dans le PIB mondial est le suivant : États-Unis, premier, Japon, deuxième, la Chine, troisième, le Brésil, huitième, Inde, douzième, Russie, neuvième, la Corée du sud, quinzième, l’Afrique du Sud est trente-deuxième.
Le seul pays africain du G20 est l’Afrique du Sud, qui est du reste le facteur limitant. Pourtant les pays africains trouvent encore des ressources pour clamer haut et fort leur désir de compter comme si la proclamation suffisait pour asseoir son existence.

Les pays qui comptent aujourd’hui

On sait tous déjà le « réveil chinois ». Monsieur Alain Peyrefitte a écrit en 1973 un livre «Quand la Chine s'éveillera, le monde tremblera». L'empire du Milieu s'est réveillé à la consommation et à la production de produits. A elle seule, la Chine représente 27% de la croissance mondiale, selon Bloomberg. La Chine représente 24% des réserves de devises (1 905 milliards de dollars en septembre 2008, quand le FMI doit se contenter 250 milliards), 20% de la population mondiale, 9% des exportations. C'est elle et ses 1,3 milliards d'habitants qui produisent la plupart des produits à bas coûts exportés à travers le monde, c'est également elle qui commande en masse des matières premières.

À coté de la Chine, il y a dans le carré d’as de l’économie mondiale : le Brésil, la Russie et l’Inde (BRIC). Lorsqu’on sait qu’à la suite de la crise asiatique de 1998, le FMI a été accusé d’imposer des recettes occidentales. C’est pour les contourner que les pays émergents ont pratiqué l’auto-assurance, accumulant de vastes réserves de devises grâce à une monnaie sous-évaluée. Ces pays ont compris que la monnaie comptait dans le développement, ce qui n’est pas le cas des pays de la zone franc par exemple. Il est estimé dans un rapport que le poids des BRIC dans la croissance mondiale passera de 20 % en 2003 à 40 % en 2025. Par ailleurs, leur poids total dans l’économie passera de 10 % en 2004 à plus de 20 % en 2025. Et c’est naturellement que les pays émergents prennent plus de poids au sein du FMI : 5 % des parts de cette institution devraient changer de main, après une première réallocation de 2,7% décidée en 2008. Ce n’est pas normal que la Chine (3,7%) possédant une économie trois fois et demie plus grande que la France (4,9%) et le Brésil (1,4%), dont l’économie est trois fois plus forte que la Belgique (2,1) soient derrière ces deux pays en termes de poids au FMI. C’est donc à juste titre que la France accepte de céder une part de ses voix au FMI aux pays émergents et d’abord à la Chine. Il est vrai que la France anticipe une négociation à venir sur le commerce international et la Chine est la première cause du déficit de la balance commerciale de la France. Le FMI calcule la capacité de décision d’un État en fonction de son poids économique. Avec 2 % à 3 % du commerce mondial, l’Afrique détient 2 % des droits de vote du FMI, elle ne représente rien, donc elle n’aura droit à rien. Mais pourquoi ces pays avancent tandis que l’Afrique stagne ?

L’Afrique n’a encore rien compris

«L’Afrique doit être considérée comme un partenaire, et ne doit pas être marginalisée» : telle était la déclaration en Septembre 2009, du directeur du département des affaires économiques de l’Union africaine (UA), l’Ivoirien René N’Guetta Kouassi, sur TV5. Evoquant la réforme du G20, transformé en «forum de coopération économique international», lors du sommet de Pittsburg, il a indiqué qu’«il y a des erreurs à corriger pour que la voix de l’Afrique soit entendue dans le concert des nations». Ce que notre frère a oublié c’est qu’aujourd’hui dans le concert des nations, «on compte parce qu’on pèse». Ce ne sont pas non plus les incantations de M. Ping rappelant que «L’Afrique, c’est dix fois l’Europe» qui changeront la configuration des choses. Ce dernier, en dénonçant l’absence de pays africains à la table des chefs d’Etat et de gouvernement réunis à Washington : «Certes, il y avait l’Afrique du Sud. Mais l’Afrique du Sud représentait les pays émergents, comme l’Inde et la Chine, et non les pays en voie de développement», a-t-il estimé. Il a exigé de la communauté internationale que l’Afrique soit désormais associée aux décisions qui engageraient son destin.

Le véritable problème c’est que la participation africaine à l’économie mondiale est infime. Le continent joue un seul rôle depuis la période coloniale : mettre à la disposition des pays riches des matières premières qui alimentent leurs usines et qui font tourner l’économie mondiale. Le jour que les pays africains transformeront les matières premières bradées aux occidentaux et les concurrencer sur le marché international, alors ce sera le déclenchement d’un processus d’indépendance.

L’Afrique peut décoller

Certains experts attribuent les «souffrances» du continent souvent ironiquement à «l’incompétence» des dirigeants africains. Des savants comme Aimé Césaire, Frantz Fanon, Cheick Anta Diop à rebours des afropessimistes, ont démontré que l’Africain, par nature, n’est pas tributaire d’une incompétence biologique congénitale. Ces illustres savants n’ont jamais été ces chercheurs africains conciliants, dociles et dont l’infantilisme et la naïveté sont salués comme un signe d’ouverture à l’esprit universel. L’africain, sinon le noir à qui on déniait toute civilisation est celui-là même qui en fut le premier dépositaire de l’humanité avant de la transmettre aux autres peuples et notamment aux grecs, ancêtres culturels des européens. Ce détour historique vaut pour ce qu’il nous dit que l’Afrique peut se développer et compter dans le monde.

En effet, le continent peut réduire sa dépendance à l’égard des bailleurs s’il améliore encore l’environnement des affaires pour attirer les investisseurs, facilite les échanges régionaux et investit dans les infrastructures pour développer les marchés. Le secteur des télécommunications a démontré que des investisseurs pouvaient gagner de l’argent en Afrique dans le privé tout en contribuant à créer de la croissance et des emplois. Pour aider le secteur privé à investir considérablement pour rattraper son retard, l’Afrique doit innover en matière de réglementation.

Le 10 septembre dernier, le dernier rapport «Doing Business 2009» de la Banque mondiale, sur l’arsenal réglementaire qui encadre la vie des entreprises de 181 pays, plaçait quatre africains (Sénégal, Burkina, Botswana et l’Égypte) dans les dix premiers pays réformateurs. Seule l’Égypte figurait dans le peloton de tête de l’édition précédente. Une attractivité grandissante qui n’a pas échappé aux investisseurs internationaux. En 2007, le continent a établi un nouveau record avec 53 milliards de dollars d’investissements directs étrangers (IDE), selon le rapport 2008 sur l’investissement dans le monde de la Cnuced. Loin des 9 milliards par an enregistrés entre 1995 et 2000. Et dix pays (Nigeria, Égypte, Afrique du Sud, Maroc, Libye, Soudan, Guinée équatoriale, Algérie, Tunisie, Madagascar) concentrent 82 % des investissements étrangers.

En moyenne, l'accès au marché des pays africains est meilleur que celui de l'Amérique latine, de l'Asie, et de la région Pacifique.

L'Afrique est en passe de devenir la nouvelle frontière d'investissement des marchés émergents. Il ne s'agit plus seulement d'un engouement limité aux seuls grands marchés de la région, qu'ils soient sud-africains ou nigérians. Le Kenya, le Ghana, ou encore le Botswana sont en passe de devenir les nouvelles coqueluches des marchés financiers.

Pourquoi un tel enthousiasme ? Les raisons sont multiples. Certaines tiennent aux conditions internationales, à la recherche de rendements et à la forte liquidité poussant les investisseurs en direction de nouvelles classes d'actifs plus risquées mais à fort potentiel. Parallèlement, les opportunités d'investissements se sont accrues avec plus de 522 firmes désormais listées sur les marchés boursiers subsahariens, contre à peine 66 en 2000.

En Europe, le financier Suisse Nicolas Clavel a lancé le 1er juillet 2007 le tout premier hedge fund entièrement dédié à l'Afrique, Scipion African Opportunities Fund, un fonds d'investissement qui a pour ambition de réunir 700 millions de dollars.

Quelques semaines plus tard, c'était au tour du fonds du private equity sud-africain Pamodzi Investment Holdings de surenchérir avec le lancement d'un autre fonds panafricain de plus de 1,3 milliards de dollars, appuyé par des institutions financières nord-américaines. Quant au fonds londonien Blakeney Management, il se propose d'investir dans des pays comme l'Angola, le Mozambique ou encore l'Éthiopie, misant sur ces pays qui ont réussi à sortir de longues années de conflits. Au total, ce sont près de 3 milliards de fonds de private equity qui ont été levés au cours de l'année 2007. Peu de temps auparavant, le prince saoudien Al-Walid Ibn Talal avait également investi dans le secteur bancaire au Ghana, dans les télécoms au Sénégal et impulsé la création avec la banque HSBC d'un nouveau fonds, HSBC Kingdom Africa Investments, doté de 400 millions de dollars.

L’Afrique peut compter, si elle se fait confiance, refusant d’être la périphérie des autres ; si elle utilise le capital humain disponible pour organiser la production. Le continent aura besoin d’une stabilité politique et sociale nécessaire à son développement et cela passe par l’établissement d’une démocratie pérenne.

Dr Seraphin Prao, le 6 octobre 2009

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